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L’ATHÉNIEN.

Tu as raison. En général, à l’égard de toute imitation, soit en peinture, soit en musique, soit en tout autre genre, ne faut-il pas, pour en être un juge éclairé, connaître ces trois choses : [669b] en premier lieu, l’objet imité ; en second lieu, si l’imitation est juste ; enfin si elle est belle, que cette imitation soit faite par la parole, ou par la mélodie, ou par la mesure ?

CLINIAS.

Il me paraît que oui.

L’ATHÉNIEN.

Voyons donc ce qui fait la difficulté de bien juger par rapport à la musique, et ne nous rebutons pas. Comme c’est de toutes les imitations la plus vantée, c’est aussi celle qui exige de l’artiste le plus de précaution. L’erreur ici serait très funeste, car elle s’étend jusque [669c] sur les mœurs ; et en même temps elle est très délicate à saisir, parce qu’il s’en faut bien que les poètes soient aussi habiles dans leur art que les Muses elles-mêmes. Jamais les Muses ne s’écarteraient du vrai, au point d’adapter à des paroles faites pour des hommes une figure et une mélodie qui ne peuvent convenir qu’à des femmes ; ou de joindre des mesures d’esclaves ou de personnes viles à une mélodie et à des figures d’hommes