Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, VII et VIII.djvu/257

Cette page n’a pas encore été corrigée

qui a le plaisir en partage, je soutiens que cette réponse est absurde dans leur bouche. Mais gardons-nous de faire tenir aux Dieux un pareil [662e] langage ; mettons-le plutôt sur le compte de nos pères et de nos législateurs. Supposons que les questions que je viens de faire s’adressent uniquement au législateur, et que c’est lui qui nous a répondu que la vie la plus riche en plaisirs est la plus heureuse. Mon père, lui dirais-je, tu ne veux donc pas que je mène la vie la plus heureuse, puisque tu n’as cessé de m’exhorter à vivre dans la pratique de la justice ? Celui qui aurait posé un pareil principe, soit législateur, soit père, serait condamné, selon moi, à la plus évidente contradiction avec lui-même. Et, d’un autre côté, s’il soutenait que la vie la plus juste est aussi la plus heureuse, chacun pourrait lui demander ce que la loi trouve dans la justice de beau et de bon [663a] qui la fait préférer au plaisir ; car sans le plaisir, quel bien peut-il rester à l’homme juste ? Quoi ! l’estime et l’approbation des hommes et des Dieux serait-elle une chose belle et bonne, mais incapable de causer aucun plaisir ; et l’infamie aurait-elle les qualités opposées ? Divin législateur, cela ne peut pas être, dirons-nous. Peut-il être beau et bon, et en même temps fâcheux, de ne commettre aucune injus-