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NOTES

bien saisir la chaîne de tout le raisonnement ; la voici :

Qu’est-ce que juger faux ? c’est se méprendre, prendre un objet pour un autre. Voilà la théorie reçue (celle de Locke), et que Socrate a l’air d’admettre, p. 172 : « Nous disons qu’un faux jugement…, et Théétète, qui abonde dans ce sens, lui dit (p. 173) : « C’est très bien dit, car on juge faux, par exemple, lorsqu’on prend le laid pour le beau, ou le beau pour le laid… »

Socrate le laisse aller quelque temps sur cette théorie qu’il finit par renverser ainsi :

Si juger, c’est se méprendre, le jugement suppose deux termes ; or, il faut que ces deux termes soient présens à la pensée qui prononce sur leur rapport, ou que l’un y soit présent et non l’autre. Parcourons ces deux cas.

Premier cas. La méprise est impossible ; nul ne prend le juste, connu comme juste, c’est-à-dire présent à la pensée, pour l’injuste, connu comme tel, c’est-à-dire encore présent à la pensée. Donc, dans ce premier cas, il me faut quitter la théorie que je t’avais exposée, et toi, il te faut quitter ton approbation, ta réponse, où tu acceptais cette théorie de la méprise. Il te faut la quitter, car l’exemple sur lequel tu t’appuyais tombe en ruine. En effet, je soutiens que nul ne prend le beau, présent à l’esprit, pour le laid, s’il est présent à l’esprit, et réciproquement (176). Sur quoi Théétète