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soit long ou court, pourvu qu’ils parviennent à la vérité. Les autres, au contraire, n’ont jamais de temps à perdre lorsqu’ils parlent ; car l’eau qui coule les oblige à se hâter[1], et ne leur permet pas de parler de ce qu’ils aimeraient le mieux ; la partie adverse est là qui leur fait la loi, en faisant lire la formule d’accusation qu’ils appellent antomosie[2], du contenu de laquelle il est défendu de s’écarter. Leurs plaidoyers sont toujours pour ou contre un esclave comme eux, et s’adressent à un maître assis qui tient en sa main la justice. Leurs disputes ne sont jamais sans conséquence ; il y va toujours de quelque intérêt personnel, souvent même de la vie ; tout cela les rend âpres et ardents, habiles à gagner leur maître par des paroles flatteuses, et à lui complaire dans leurs actions : mais ils n’ont ni droiture, ni grandeur d’âme ; car la servitude où ils s’engagent dès leur jeunesse les empêche de se développer, leur ôte toute élévation et

  1. À Athènes le temps que devait parler chaque orateur était réglé ; et pour le mesurer, on se servait d’une clepsydre ou horloge d’eau.
  2. On l’appelait ainsi (ἀντωμοσία), parce que l’accusateur jurait que les griefs contenus dans cette formule ou précis d’accusation étaient vrais, et que l’accusé jurait qu’ils étaient faux. Il n’était point permis, soit en accusant, soit en défendant, de dire rien d’étranger à cette formule.