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et d’autre mettre de côté toute chicane verbale ? Mon cher, poursuivra-t-il, attaque mon système d’une manière plus noble, et prouve-moi, si tu le peux, que chacun de nous n’a pas des sensations qui lui sont propres, ou, si elles le sont, qu’il ne s’ensuit pas que ce qui paraît à chacun devient, ou, s’il faut se servir du mot être, est tel pour lui seul. Au surplus, quand tu parles de pourceaux et de cynocéphales, non-seulement tu montres toi-même à l’égard de mes écrits la stupidité d’un pourceau, mais tu engages ceux qui t’écoutent à en faire autant ; et cela n’est guère bien. Pour moi, je soutiens que la vérité est telle que je l’ai décrite, et que chacun de nous est la mesure de ce qui est et de ce qui n’est pas : que cependant il y a une différence infinie entre un homme et un autre homme, en ce que les choses sont et paraissent autres à celui-ci, et autres à celui-là ; et bien loin de ne reconnaître ni sagesse, ni homme sage, je dis au contraire qu’on est sage lorsque, changeant la face des objets, on les fait paraître et être bons à celui auquel ils paraissaient et étaient mauvais auparavant. Du reste, ne va pas de nouveau m’attaquer sur les mots, mais conçois encore plus clairement ma pensée de cette manière. Rappelle-toi ce qui a été dit précédemment, que les alimens paraissent et sont amers au malade, et qu’ils sont et