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SOCRATE.

Il faut que tu aimes bien les discours, Théodore, et que tu sois bien bon pour t’imaginer que je suis comme un sac plein de discours, et qu’il m’est aisé d’en tirer un pour te prouver sur-le-champ que ce sentiment n’est pas vrai. Tu ne fais pas attention à ce qui se passe ; qu’aucun discours ne vient de moi, mais toujours de celui avec lequel je converse ; et que je ne sais rien qu’une petite chose, je veux dire, examiner passablement ce qui est dit par un autre plus habile. C’est ce que je vais essayer de faire vis-à-vis de Protagoras, sans rien dire de moi-même.

THÉODORE

Tu as raison, Socrate ; fais comme tu dis.

SOCRATE.

Sais-tu, Théodore, ce qui m’étonne dans ton ami Protagoras ?

THÉODORE

Quoi donc ?

SOCRATE.

J’ai été fort content de tout ce qu’il dit ailleurs, pour prouver que chaque chose est ce qu’elle paraît à chacun ; mais j’ai été étonné qu’au commencement de sa Vérité[1], il n’ait pas

  1. Le Scholiaste. Le livre de Protagoras était intitulé Vérité. — C’était peut-être le même ouvrage dont Porphyre cite autrement le titre : de l’Existence, ou de la Nature. Voyez Eusèbe, Préparation évangélique, X, 3.