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voudrait savoir de nous à ce moment même si nous dormons et si nos pensées sont autant de rêves, ou si nous sommes éveillés et conversons réellement ensemble.

THÉÉTÈTE.

Il est fort difficile, Socrate, de démêler les véritables signes auxquels cela peut se reconnaître ; car, dans l’un et l’autre état, ce sont les mêmes caractères, qui se répondent, pour ainsi dire. En effet rien n’empêche que nous ne nous imaginions tenir ensemble en dormant les mêmes discours que nous tenons à présent, et lorsqu’en songeant nous croyons raconter nos songes, la ressemblance est merveilleuse avec ce qui se passe dans l’état de veille.

SOCRATE.

Tu vois donc qu’il n’est pas malaisé de faire là-dessus des difficultés, puisque l’on conteste même sur la réalité de l’état de veille ou de sommeil, et que le temps où nous dormons étant égal à celui où nous veillons, notre âme, dans chacun de ces états, se soutient à elle-même que les jugemens qu’elle porte alors sont les seuls vrais ; en sorte que nous disons pendant un égal espace de temps, tantôt que ceux-ci sont véritables, tantôt que ce sont ceux-là, et que nous prenons également parti pour les uns et pour les autres.