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core fécondé, et connaissant qu’ils n’ont aucun besoin de moi, je m’occupe avec bienveillance à leur procurer un établissement ; et je puis dire, grâce à Dieu, que je conjecture assez heureusement auprès de qui je dois les placer pour leur avantage. J’en ai ainsi donné plusieurs à Prodicus, et à d’autres sages et divins personnages. La raison pour laquelle je me suis étendu sur ce point, mon cher ami, est que je soupçonne, comme tu t’en doutes toi-même, que ton âme souffre les douleurs de l’enfantement. Agis donc avec moi comme avec le fils d’une sage-femme, expert lui-même en ce métier ; efforce-toi de répondre, autant que tu en es capable, à ce que je te propose ; et si, après avoir examiné ta réponse, je pense que c’est une chimère, et non un fruit réel, et qu’en conséquence je te l’arrache et le rejette, ne t’emporte pas contre moi, comme font au sujet de leurs enfans celles qui sont mères pour la première fois. En effet, mon cher, plusieurs se sont déjà tellement courroucés, lorsque je leur enlevais quelque opinion extravagante, qu’ils m’auraient véritablement déchiré. Ils ne peuvent se persuader que je ne fais rien en cela que par bienveillance pour eux ; ne se doutant pas qu’aucune divinité ne veut du mal aux hommes, que je n’agis point ainsi non plus par aucune mauvaise volonté à leur égard ;