dant qu’il est ce qu’il est ne peut vouloir devenir ou être son contraire ; mais ou il se retire, ou il périt quand l’autre arrive.
Oui, dit Cébès, j’en suis convaincu. Mais quelqu’un de la compagnie, je ne me souviens pas bien qui c’était, s’adressant à Socrate : Eh ! par les dieux, lui dit-il, n’as-tu pas déjà admis le contraire de ce que tu dis ? car n’es-tu pas convenu que le plus grand naît du plus petit, et le plus petit du plus grand ; en un mot, que les contraires naissent toujours de leurs contraires ? et présentement, il me semble que je t’entends dire que cela ne peut jamais arriver.
Socrate s’était penché en avant pour entendre. Fort bien, dit-il, tu as raison de rappeler ce qui s’est dit ; mais tu ne vois pas la différence qu’il y a entre ce que nous avons dit alors, et ce que nous disons maintenant. Nous avons dit qu’une chose naît de son contraire ; et ici nous disons qu’un contraire ne devient jamais lui-même son contraire, ni en nous ni dans la nature. Alors, mon ami, nous parlions des choses positives qui ont leur contraire, et nous pouvions les nommer chacune par leur nom ; ici nous parlons des essences mêmes, qui par leur présence donnent leur nom aux choses où elles se rencontrent : et c’est de ces dernières que nous prétendons qu’elles ne peuvent naître