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Au contraire, elle sort toute chargée des liens de l’enveloppe matérielle, que le commerce continuel et l’union trop étroite qu’elle a eus avec le corps, et le soin assidu qu’elle a pris de lui, lui ont rendue comme essentielle.

Très certainement.

Cette enveloppe, mon cher Cébès, est lourde, pesante, formée de terre et visible. L’âme, chargée de ce poids, y succombe, et entraînée de nouveau vers le monde visible par l’horreur de l’immatériel et de cet autre monde sans lumière, de l’enfer, comme on l’appelle, [81d] elle va errant, à ce qu’on dit, parmi les monumens et les tombeaux, autour desquels aussi l’on a vu parfois des fantômes ténébreux, comme doivent être les ombres d’âmes coupables qui ont quitté la vie avant d’être entièrement purifiées, et retiennent quelque chose de la région visible, et que pour cela l’œil des hommes peut encore voir.

Cela est très vraisemblable, Socrate.

Oui, sans doute, Cébès, et il est vraisemblable aussi que ce ne sont pas les âmes des bons, mais celles des méchans, qui sont forcées d’errer dans ces lieux, où elles portent la peine de leur première vie, qui a été méchante, et où elles continuent d’errer jusqu’à ce [81e] que l’appétit naturel de la masse corporelle qui les suit les ramène dans un corps, et alors elles rentrent