lui de bien philosopher, c’est-à-dire, au fond, de s’exercer [81a] à mourir aisément : dis, n’est-ce pas là s’exercer à la mort ?
Tout-à-fait.
L’âme donc, en cet état, se rend vers ce qui est semblable à elle, immatériel, divin, immortel et sage ; et là elle est heureuse, délivrée de l’erreur, de la folie, des craintes, des amours déréglés et de tous les autres maux des humains : et, comme on le dit des initiés, elle passe véritablement l’éternité avec les dieux. N’est-ce pas là ce que nous devons dire, ô Cébès ?
Assurément, répondit Cébès.
[81b] Mais si elle se retire du corps souillé et impure, comme celle qui a toujours été mêlée avec lui, qui l’a servi et aimé, qui s’est laissé charmer par lui et par les voluptés, au point de croire qu’il n’y a de réel que ce qui est corporel, ce qu’on peut toucher, boire, manger, ou ce qui sert aux plaisirs de l’amour ; et au contraire se faisant une habitude de haïr, d’avoir en horreur et de fuir ce qui est obscur et invisible aux yeux, ce qui est intellectuel, et ne se saisit que par la philosophie, [81c] penses-tu que l’âme en cet état puisse sortir du corps pure et dégagée ?
Non, sans doute, en aucune manière.