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est-il un obstacle, ou ne l’est-il pas, quand on l’associe [65b] à cette recherche ? Je vais m’expliquer par un exemple. La vue et l’ouïe ont-elles quelque certitude, ou les poètes[1] ont-ils raison de nous chanter sans cesse, que nous n’entendons ni ne voyons véritablement ? Mais si ces deux sens ne sont pas sûrs, les autres le seront encore beaucoup moins ; car ils sont beaucoup plus faibles. Ne le trouves-tu pas comme moi ?

Tout-à-fait, dit Simmias.

Quand donc, reprit Socrate, l’âme trouve-t-elle la vérité ? car pendant qu’elle la cherche avec le corps, nous voyons clairement que ce corps la trompe et l’induit en erreur.

[65c] Cela est vrai.

N’est-ce pas surtout dans l’acte de la pensée que la réalité se manifeste à l’âme ?

Oui.

Et l’âme ne pense-t-elle pas mieux que jamais lorsqu’elle n’est troublée ni par la vue, ni par l’ouïe, ni par la douleur, ni par la volupté, et que, renfermée en elle-même et se dégageant, autant que cela lui est possible, de tout com-

  1. Parménide, Empédocle, Épicharme.

    C’est l’esprit qui voit, c’est l’esprit qui entend :
    L’oeil est aveugle, l’oreille est sourde.

    Vers d’Épicharme (STOB. Floril. IV ; PLUT. de Fortuna).