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quelque mérite. Que faire ? Ne pas s’en mettre en peine, et aller toujours son chemin.

Socrate.

Mon cher Euthyphron, être un peu moqué n’est peut-être pas une grande affaire : car, après tout, à ce qu’il me semble, les Athéniens s’embarrassent assez peu qu’un homme soit habile, pourvu qu’il renferme son savoir en lui-même ; mais dès qu’il s’avise d’en faire part aux autres, [3d] alors ils se mettent tout de bon en colère, ou par envie, comme tu dis, ou par quelque autre raison.

Euthyphron.

Quant à cela, je n’ai pas grande tentation, Socrate, d’éprouver les sentimens qu’ils ont pour moi.

Socrate.

Voilà donc pourquoi tu es si fort réservé, et ne communiques pas volontiers ta sagesse ; mais, pour moi, et je crains fort que les Athéniens ne s’en soient aperçus, l’amour que j’ai pour les hommes me porte à leur enseigner tout ce que je sais, non-seulement sans leur demander de récompense, mais en les prévenant même, et en les pressant de [3e] m’écouter. Si l’on se contentait de me plaisanter un peu, comme tu dis qu’on le fait de toi, ce ne serait pas chose si désagréable que de passer ici quelques heures à rire et à se