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non des lois, mais des hommes ; mais, si tu fuis, si tu repousses sans dignité l’injustice par l’injustice, le mal par le mal, si tu violes le traité qui t’obligeait envers nous, tu mets en péril ceux que tu devais protéger, toi, tes amis, ta patrie et nous. Tu nous auras pour ennemies pendant ta vie, et quand tu descendras chez les morts, nos sœurs, les lois des enfers, ne t’y feront pas un accueil trop favorable, sachant que tu as fait tous ces efforts pour nous détruire. Ainsi, que Criton n’ait pas sur toi plus de pouvoir que nous, et ne préfère pas ses conseils aux nôtres. »

Tu crois entendre ces accents, mon cher Criton, comme ceux que Cybèle inspire croient entendre les flûtes sacrées[1] : le son de ces paroles retentit dans mon âme, et me rend insensible à tout autre discours ; et sache qu’au moins dans ma disposition présente, tout ce que tu pourras me dire contre sera inutile. Cependant si tu crois pouvoir y réussir, parle.

Criton.

Socrate, je n’ai rien à dire.

  1. Les Corybantes, prêtres de Cybèle, avec des cymbales et surtout avec des flûtes, troublaient la raison de ceux qui prenaient part à leurs fêtes, et les rendaient insensibles à toute autre impression que celle de la flûte (Voyez l’Ion).