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fermer la bouche aux autres, de se rendre meilleur soi-même. Voilà ce que j’avais à prédire à ceux qui m’ont condamné : il ne me reste qu’à prendre congé d’eux.

[39e] Mais pour vous, qui m’avez absous par vos suffrages, Athéniens, je m’entretiendrai volontiers avec vous sur ce qui vient de se passer, pendant que les magistrats[1] sont occupés, et qu’on ne me mène pas encore où je dois mourir. Arrêtez-vous donc quelques instants, et employons à converser ensemble le temps qu’on me laisse. [40a] Je veux vous raconter, comme à mes amis, une chose qui m’est arrivée aujourd’hui, et vous apprendre ce qu’elle signifie. Oui, juges (et en vous appelant ainsi, je vous donne le nom que vous méritez), il m’est arrivé aujourd’hui quelque chose d’extraordinaire. Cette inspiration prophétique qui n’a cessé de se faire entendre à moi dans tout le cours de ma vie, qui dans les moindres occasions n’a jamais manqué de me détourner de tout ce que j’allais faire de mal, aujourd’hui qu’il m’arrive ce que vous voyez, ce qu’on pourrait prendre, et ce qu’on prend en [40b] effet pour le plus grand de tous les maux, cette voix divine a gardé le silence ; elle ne m’a arrêté ni ce matin quand je suis sorti de ma maison, ni quand je

  1. Les Onze.