sont conservés jusqu’à nous dans la mémoire des hommes, tous ceux qui se sont portés, comme toi, pour les défenseurs de la justice, n’ont loué que la gloire, les honneurs, les récompenses qui y sont attachées, et de même n’ont blâmé l’injustice que par ses suites ; personne n’a considéré la justice et l’injustice telles qu’elles sont en elles-mêmes dans l’ame humaine, loin des regards des dieux et des hommes, et n’a montré, ni en vers ni en prose, que l’une est le plus grand mal de l’ame et l’autre son plus grand bien. [367a] Si dès le commencement vous nous aviez tous parlé dans ce sens et inculqué ce principe dès l’enfance, au lieu d’être en garde contre l’injustice d’autrui, chacun de nous, devenu pour lui-même une sentinelle vigilante, craindrait de laisser pénétrer dans son ame l’injustice comme le plus grand des maux. Thrasymaque ou quelque autre en aurait peut-être dit autant et plus que moi sur le juste et l’injuste, bouleversant témérairement, à mon avis, la nature de l’un et de l’autre. Pour moi, [367b] à ne te rien cacher, si j’ai tant prolongé ce discours, c’est que je désire en entendre la réfutation. En conséquence, ne te borne pas à nous montrer que la justice est préférable à l’injustice ; explique-nous les effets que l’une et l’autre produisent par elles-mêmes dans l’ame et qui font que l’une est un bien et l’autre
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