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rie, tu laisses souvent échapper, dans tes relations avec les autres, même sans y prendre garde, des traits qui font de toi un farceur de profession.

Il pourrait bien en être ainsi.

La poésie imitative produit en nous le même effet pour l’amour, la colère, et toutes les passions de l’ame, agréables ou pénibles, dont nous avons reconnu que nous sommes sans cesse obsédés. Elle nourrit et arrose en nous ces passions, elle les rend maîtresses de notre ame, quand il faudrait au contraire les laisser périr faute d’alimens et nous en rendre maîtres nous-mêmes, si nous voulons devenir heureux et vertueux, et non pas méchans et misérables.

Je ne puis m’empêcher d’en convenir.

Ainsi, mon cher Glaucon, lorsque tu rencontreras des admirateurs d’Homère disant que ce poète a formé la Grèce, qu’il mérite qu’on lise sans cesse ses ouvrages pour apprendre à gouverner, a bien conduire les affaires humaines et pour régler sa vie entière à l’aide de cette poésie ; il faudra avoir toutes sortes d’égards et de considération pour ceux qui tiennent ce langage, comme ayant tout le mérite possible, et leur accorder qu’Homère est le plus grand des poètes et le premier des poètes tragiques ; mais en même temps souviens-toi qu’il ne faut admettre