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plus méchans. Loin de pouvoir rassassier ses désirs, il manque presque de tout et il est vraiment pauvre. Pour qui sait voir dans le fond de son âme, il passe sa vie dans une frayeur continuelle, en proie aux chagrins et aux angoisses[1]. Tel est cet homme, s’il est vrai que sa condition ressemble à celle de l’État dont il est le maître : or, elle y ressemble, n’est-ce pas ?

Oui.

Ajoutons à tout cela ce que nous avons déjà dit, que le pouvoir suprême le rend chaque jour nécessairement plus envieux, plus perfide, plus injuste, plus impie, plus disposé à loger et à nourrir tous les vices ; que, par toutes ces raisons, il est le plus malheureux de tous les hommes, et qu’ensuite il rend semblables à lui ceux qui l’approchent.

Nul homme de bon sens ne te contredira.

Allons, et, comme le juge d’un concours, détermine le premier rang, le second et ainsi de suite, par rapport au bonheur, entre ces cinq caractères, le royal, le timocratique, l’oligarchique, le démocratique, le tyrannique.

Le jugement est facile à prononcer. Je les

  1. Voyez la belle imitation que Tacite a faite de ce passage au sujet de Tibère. Annal., VI, 6.