Il en est de même du bien. Qu’un homme ne puisse, séparant l’idée du bien de toutes les autres, en donner une définition précise ; qu’il ne sache pas se frayer un passage à travers toutes les objections, comme un brave dans la mêlée ; que tout en désirant ardemment démontrer cette idée non pas selon l’opinion, mais selon la réalité, il ne puisse surmonter tous les obstacles par la puissance de la logique ; ne diras-tu pas de cet homme qu’il ne connaît ni le bien par essence ni aucun autre bien, que s’il saisit quelque fantôme de bien, ce n’est point sur la science mais sur l’apparence qu’il se fonde, que sa vie se passe dans un profond sommeil rempli de vains rêves, dont il ne se réveillera pas probablement en ce monde, avant d’aller dans l’autre dormir d’un sommeil parfait ?
Oui, certes, je dirai tout cela.
Mais si un jour tu viens à former réellement ces mêmes élèves dont tu ne fais ici l’éducation qu’en paroles, tu ne les mettrais pas sans doute à la tête de l’État et tu ne leur donnerais pas un grand pouvoir, s’ils étaient incapables de rendre raison de leurs pensées, comme ces lignes qu’on appelle irrationnelles[1].
Assurément non.
- ↑ Voyez la note à la fin du volume.