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trompe quelquefois dans un calcul, en tant qu’il se trompe. Il est vrai que l’on dit : le médecin, le calculateur, le grammairien s’est trompé ; mais, à mon avis, aucun d’eux ne se trompe, en tant qu’il est ce qu’on le dit être. Et, à parler rigoureusement, puisque tu veux de la rigueur dans les termes, aucun artiste ne se trompe ; car il ne se trompe qu’autant que son art l’abandonne, et en cela il n’est plus artiste. Il en est ainsi de tout art, de toute science, de toute autorité ; ce n’est pas en tant qu’autorité qu’elle se trompe. Cependant dans le langage ordinaire on dit : le médecin s’est trompé, l’autorité s’est trompée. Suppose donc que j’ai parlé comme le vulgaire. Mais maintenant je te dis, avec toute l’exactitude requise, que celui qui gouverne, en tant qu’il gouverne, ne peut se tromper. Ce qu’il ordonne est donc toujours ce qu’il y a de plus avantageux pour lui, et s’y conformer est le devoir de quiconque lui est soumis. Ainsi, comme je le disais d’abord, la justice est ce qui est avantageux au plus fort[1].

Soit ; et tu crois que je suis un calomniateur ?

Très certainement.

Tu crois que j’ai cherché à te tendre des piéges par des interrogations captieuses ?

  1. Pris ici dans le sens de meilleur.