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Les premiers, dont la curiosité est toute dans les yeux et dans les oreilles, aiment les belles voix, les belles couleurs, les belles figures et tous les ouvrages où il entre quelque chose de semblable ; mais leur intelligence est incapable d’apercevoir et d’aimer le beau lui-même.

La chose est comme tu dis.

Ne sont-ils pas rares ceux qui peuvent s’élever jusqu’au beau lui-même et le contempler dans son essence ?

Très rares.

Qu’est-ce que la vie d’un homme qui connaît de belles choses, dans une ignorance absolue du beau lui-même, et qui n’est pas capable de suivre ceux qui voudraient le lui faire connaître ? Est-ce un rêve ou une réalité ? Prends garde : qu’est-ce que rêver ? N’est-ce pas, qu’on dorme ou qu’on veille, prendre la ressemblance d’une chose pour la chose même ?

Oui, je dirais de cet homme qu’il rêve.

Mais quoi ! celui qui tout au contraire peut contempler le beau, soit en lui-même soit en ce qui participe à son essence, sans prendre jamais le beau pour les choses belles, ni les choses belles pour le beau, sa vie te semble-t-elle un rêve ou une réalité ?

Une réalité, certes.

Celui-ci qui connaît, possède une connais-