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entretien et leur nourriture, ne finissent par contracter peu à peu, sans s’en apercevoir, quelque grand vice dans leur ame ? Ne devrons-nous pas au contraire rechercher ces artistes qu’une heureuse nature met sur la trace du beau et du gracieux, afin que semblables aux habitans d’un pays sain, les jeunes guerriers ressentent de toutes parts une influence salutaire, recevant sans cesse, en quelque sorte par les yeux et les oreilles, l’impression des beaux ouvrages, comme un air pur qui leur apporte la santé d’une heureuse contrée, et les dispose insensiblement, dès leur enfance, à aimer et à imiter le beau et à mettre entre eux et lui un parfait accord ?

Ces précautions rendraient leur éducation excellente.

Si la musique, mon cher Glaucon, est la partie principale de l’éducation, n’est-ce pas parce que le rhythme et l’harmonie ont au suprême degré la puissance de pénétrer dans l’ame, de s’en emparer, d’y introduire le beau et de la soumettre à son empire, quand l’éducation a été convenable, au lieu que le contraire arrive lorsqu’on la néglige ? Le jeune homme, élevé convenablement par la musique, ne saisira-t-il pas avec une étonnante sagacité ce qu’il y a de défectueux et d’imparfait dans les ouvrages de l’art et de la nature, et n’en éprouvera-t-il pas une impression juste