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dits dans notre État. Il n’y sera pas permis de dire à un enfant qu’en commettant les plus grands crimes il ne fait rien d’extraordinaire, et qu’en tirant la plus cruelle vengeance des mauvais traitemens qu’il aura reçus de son père, il ne fait qu’une chose dont les premiers et les plus grands des dieux lui ont donné l’exemple.

Non, par Jupiter ; ce ne sont pas là des choses qui soient bonnes à dire.

Et si nous voulons que les gardiens de l’État regardent comme une infamie de se quereller entre eux à tout propos, [378c] nous passerons absolument sous silence les guerres des dieux, les piéges qu’ils se dressent et leurs querelles. Il n’y a d’ailleurs rien de vrai dans ces fables. Il faut encore se bien garder de faire connaître, soit par des récits, soit par des représentations figurées, les guerres des géans[1] et ces haines de toute espèce qui ont armé les dieux et les héros contre leurs proches et leurs amis. Au contraire, si nous voulons persuader que jamais la discorde n’a régné entre les citoyens d’un même État, et qu’elle ne peut y régner sans crime y il faut [378d] que les vieillards de l’un et de l’autre sexe ne disent rien aux enfans dès leur plus jeune âge et à mesure qu’ils avancent dans la vie, qui ne tende à cette

  1. Voyez le commencement de l’Euthyphron, t. Ier, p. 19-21.