Je rougirais, Socrate, a-t-il répondu, de faire un pareil aveu ; c’est pourtant ce que disent la plupart des hommes.
Est-ce à eux, ai-je repris, que j’adresserai la parole, ou bien à toi ?
Si tu veux, m’a-t-il dit, commence d’abord par disputer contre le sentiment de la multitude.
À la bonne heure, peu m’importe, pourvu que tu répondes. Que ce soit là ta pensée ou non, comme c’est la chose en elle-même que j’examine surtout, il en résultera également que nous serons examinés l’un et l’autre, moi qui interroge et toi qui réponds.
[333d] Protagoras a d’abord fait des façons, alléguant pour excuse que la matière était difficile : enfin il s’est accordé à répondre.
Je reviens donc à ma question, ai-je dit : réponds-moi. Peut-on commettre des injustices et être prudent ?
Soit, m’a-t-il dit.
Être prudent, n’est-ce pas la même chose que penser bien ?
Il l’a avoué.
Et penser bien, c’est prendre le bon parti en cela même qu’on commet une injustice.