Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, III et IV.djvu/544

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est ami, à cause de ce qui lui est ennemi. — Je le crois. — Fort bien, repris-je alors. Mais arrivés là, mes enfans, prenons garde de nous tromper. Je veux bien d'abord ne pas vous faire remarquer que l'ami est devenu ami de l'ami, en d'autres termes que le semblable est maintenant ami du semblable, ce que nous avons reconnu impossible. Passons outre, et tâchons de ne pas nous égarer dans nos raisonnemens. [219c] La médecine, disons-nous, est aimée pour la santé ? — Oui. — La santé est-elle aussi aimée ? — Sans doute. — Si elle est aimée, elle l'est pour quelque chose ? — Évidemment. — Et pour quelque chose que nous aimons, en suivant le principe que nous venons d'établir ? — Sans contredit. — Et cette chose, de son côté, ne sera-t-elle pas aimée pour quelque autre chose que nous aimons aussi ? — Oui, vraiment. — Mais n'est-il pas nécessaire de renoncer à cette marche, et d'arriver à quelque principe qui, sans nous faire retomber toujours ainsi d'ami en ami, nous conduise enfin à ce qui est [219d] l'ami par excellence, à cet ami pour lequel on peut dire que tout le reste est aimé ? — Il le faut. — Je le répète, prenons garde que toutes les autres choses qui, disons-nous, sont aimées pour cet ami par excellence, n'en prennent faussement l'apparence