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lement et, plus tard, si elle les perfectionne, ce ne sera que peu à peu.

Elle puise dans la vie et, se retournant vers la vie, elle agit sur elle.

La chimie est sortie de l’idée de l’élixir de longue vie et de l’idée de la fabrication de l’or. La notion de l’énergie est sortie de l’idée du mouvement perpétuel. La théorie de la relativité a son origine dans les tentatives faites pour mesurer la vitesse absolue de la terre. La physique atomique est née de l’assimilation du mouvement des électrons au mouvement planétaire. Ce sont là des faits qu’il est impossible de traiter par le dédain et qui donnent beaucoup à penser. Ils nous montrent que dans la science aussi s’applique l’adage : « la fortune sourit aux audacieux. » Pour réussir, c’est une vérité d’une application très générale qu’il faut toujours viser un but plus haut que celui qui peut être finalement atteint.

À la lumière de ces considérations, les idées scientifiques nous apparaissent sous un jour tout nouveau, nous sommes amenés à penser que l’importance d’une idée scientifique réside moins dans ce qu’elle contient de vérité que dans ce qu’elle contient de valeur. Tel est le cas, par exemple, de l’idée de la réalité du monde extérieur et de l’idée de causalité. Pour ces deux idées, la question qui se pose n’est pas : sont-elles vraies ou sont-elles fausses ? Mais : valent-elles quelque chose ou ne valent-elles rien ? Et c’est là une chose d’autant plus extraordinaire, que l’idée de valeur leur est, a priori, étrangère à une science tout objective comme la physique.

Il faut pourtant que nous expliquions comment l’importance d’une idée physique ne peut être complètement saisie que si l’on en a examiné la valeur. L’unique moyen d’y arriver sera celui qui s’est déjà offert à nous à propos d’un problème spécial d’optique dont nous avons parlé plus haut, et, ceci ne vaut pas seulement pour la physique, mais pour toute autre science. Nous nous tournerons vers la source de laquelle toute science tire son origine et sans laquelle aucune d’elle ne serait concevable : nous voulons dire vers l’esprit du savant qui élabore la science et qui la communique à d’autres. C’est dire que nous ferons encore appel au concept de totalité.