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absolument de même : notre comportement à l’égard des hommes qui nous entourent suppose que leurs paroles et leurs actions ont toujours des causes bien déterminées, causes qui résident, soit dans ces hommes eux-mêmes, soit dans leur entourage, même si, la plupart du temps, nous ne pouvons pas les connaître.

Demandons-nous maintenant ce que nous entendons quand nous disons que la volonté humaine est libre. Nous répondrons alors simplement ceci : Quiconque, ayant la possibilité d’accomplir deux actions, se sent en lui-même la force de pouvoir se décider à sa convenance pour l’une ou pour l’autre, est libre. Or il n’y a là aucune contradiction avec ce que nous venons de dire plus haut. Il n’y aurait contradiction que si l’homme pouvait posséder, à l’égard de lui-même, la pénétration parfaite du regard divin. Il pourrait en effet, en s’appuyant sur la loi de causalité, prévoir ses propres actes volontaires, sa volonté ne serait donc plus libre. Or la logique, à elle seule, exclue une telle possibilité. Il n’existe pas, en effet, d’œil, si perfectionné soit-il, qui soit capable de se voir lui-même. L’objet et le sujet de la puissance connaissante ne sauraient être identiques. On ne peut parler de connaissance, que si l’objet à connaître n’est pas influencé par ce qui se passe dans le sujet connaissant. La question de la validité de la loi de causalité est donc, a priori, dépourvue de sens, en ce qui concerne nos propres actes volontaires, de même qu’il est, a priori, dépourvu de sens de se demander si quelqu’un pourrait, moyennant un effort approprié, se grimper sur le dos ou bien rattraper sa propre ombre à la course.

Ainsi donc, en principe, il est loisible à chacun, dans la mesure de la puissance intellectuelle qui lui aura été départie, d’appliquer la loi de causalité à tous les phénomènes ayant lieu dans le monde qui l’entoure, à la seule condition que, ce faisant, il n’influe pas sur les phénomènes en question ; et ceci exclue évidemment qu’il l’applique à ses propres pensées et actes volontaires. Ces pensées et ces actes sont donc l’unique objet qui, par principe est soustrait à la contrainte causale. Or cet objet constitue justement le trésor le plus précieux que l’homme ait en sa possession et ce dont le bon usage lui importe souve-