Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/222

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

délicats de la physique atomique ? Pas plus du point de vue purement théorique que par des mesures, on ne saurait trancher une telle question. A priori, il dépend entièrement du libre arbitre du physicien de faire appel à la causalité dynamique stricte ou seulement à la causalité statistique au cours de ses recherches spéculatives et de l’élaboration de ses hypothèses. La décision viendra uniquement de la façon plus ou moins heureuse dont il se tirera d’affaire. Il n’y a ici, comme toujours, qu’une chose à faire : adopter à titre d’essai un des deux points de vue et voir à quelles conséquences on aboutira, exactement comme nous l’avons fait tout à l’heure quand nous avons examiné la valeur du positivisme. Il est, en principe, indifférent, d’adopter l’un ou l’autre des deux points de vue ; pratiquement, on choisira celui qui semble, a priori, être le plus satisfaisant. En ce qui me concerne, je crois préférable d’admettre l’existence d’une causalité stricte, tout simplement parce que ce genre de causalité porte plus loin et plus profondément qu’une causalité statistique qui doit renoncer, de prime abord, à certaines connaissances. Dans une physique statistique, les seules lois qui existent se rapportent à des collections de nombreux événements. Les phénomènes élémentaires sont bien tenus pour existants ; mais il est déclaré a priori qu’il n’y a aucun sens à parler de lois applicables à ces phénomènes. Or, c’est là une attitude qui ne me satisfait à aucun degré et je ne vois aucun motif qui puisse me contraindre à abandonner l’hypothèse de l’existence d’une causalité stricte, pas plus dans le monde physique que dans le monde spirituel. Naturellement, la causalité stricte n’est pas immédiatement applicable à la succession de nos impressions sensibles. Entre des impressions il ne peut jamais exister que des relations de nature statistique ; car, toute mesure, même la plus précise, comporte toujours une erreur fortuite incontrôlable. Mais une impression, considérée objectivement, n’est jamais qu’un phénomène résultant du concours d’un grand nombre d’éléments très divers. Même si chaque élément pris en particulier obéit à une loi causale rigoureuse qui le relie à un autre élément particulier lui succédant immédiatement, il reste possible qu’à une impression sensible bien déterminée, puissent succéder des