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est le développement aussi complet que possible d’une théorie. Chaque énoncé de la théorie est ensuite repris à part et mis en rapport avec les mesures. Des résultats favorables ou défavorables de cette confrontation, on tire ensuite un jugement parallèle sur l’hypothèse.

Il y a un fait très remarquable qui n’est pas sans rapport avec cet état de choses : c’est que le progrès de la physique n’est pas une évolution continue au cours de laquelle nos connaissances s’approfondiraient et s’affineraient peu à peu ; il a au contraire un caractère discontinu et, en quelque sorte, explosif. L’apparition de chaque hypothèse nouvelle provoque comme une éruption subite ; elle est un saut dans l’inconnu, inexplicable logiquement. Ensuite sonne l’heure d’une théorie nouvelle qui, une fois venue au monde, se développe d’une façon continue ; mais toujours, en subissant plus ou moins des contraintes extérieures, son sort étant, en fin de compte, réglé par les mesures. Tant que ces dernières lui demeurent favorables, l’hypothèse jouit d’une considération de plus en plus grande et la théorie reçoit une approbation de plus en plus générale ; mais, des difficultés viennent-elles à surgir quelque part à propos de l’interprétation du résultat de mesures, les doutes, les critiques et la méfiance ne tardent pas à s’élever de toute part. Ce sont là les signes de sa mort prochaine et de l’incubation d’une hypothèse nouvelle destinée à remplacer la première et dont le rôle sera, précisément de résoudre la crise et de permettre l’élaboration d’une autre théorie qui, tout en gardant les avantages de l’ancienne, sera exempte de ses défauts. L’évolution de la physique, dans son ensemble et dans chacune de ses branches, est constituée par une succession de cycles du même genre et c’est ainsi qu’elle poursuit son but qui est la connaissance du monde réel. Il suffit d’être au courant des difficultés éprouvées par la belle hypothèse électrodynamique, sur les corps en mouvement due à Lorentz, par suite de sa confrontation avec les mesures ; il suffit de connaître dans le détail les conflits d’opinion qui se sont élevés à cette occasion, pour apprécier à sa juste valeur le sentiment de délivrance avec lequel fut accueillie la théorie de la relativité. Pour l’hypothèse des quanta, on a aussi éprouvé quelque chose d’ana-