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Et tout d’abord notre langage usuel, lui-même, s’en écarte constamment. Quand nous parlons d’un objet, d’une table par exemple, nous pensons à quelque chose qui est différent du contenu des observations que nous pouvons faire sur cette table. Nous pouvons voir la table, la toucher, éprouver sa résistance, sa dureté. Si nous la heurtons, nous en ressentirons de la douleur ; mais nous ne savons rien d’une chose qui mènerait une existence autonome derrière et en dehors de toutes ces sensations. Aux yeux du positivisme, la table ne sera donc pas autre chose que le complexe des sensations associées au mot « table ». La question de savoir ce qu’est « en réalité » une table n’a, pour lui, aucun sens. Si une question, ayant trait à l’univers, ne peut être ramenée d’une manière quelconque à une impression sensible ou à une observation, elle n’a pas de sens et elle ne saurait être posée légitimement. Le positivisme ne laisse donc aucune place à la métaphysique.

Considérons le ciel étoilé. L’image que nous en avons est celle de points ou de minuscules plages lumineuses dont les mouvements peuvent être soumis à des mesures plus ou moins exactes et dont le rayonnement est, lui aussi, susceptible d’être mesuré, tant au point de vue de l’intensité que de la couleur. Ces mesures, à parler en positiviste, ne constituent pas seulement la base de l’astronomie et de l’astrophysique, elles en sont, à proprement parler, le contenu propre et exclusif. Tout ce qui est ajouté aux résultats des mesures, pour les besoins de la compréhension, est un hors-d’œuvre purement humain, une libre invention de l’esprit.

Dire par exemple, avec Ptolémée : la terre est le centre du monde, le soleil et tous les astres se meuvent autour d’elle ; ou bien affirmer, avec Copernic : la terre n’est qu’un point infime, une poussière dans l’univers, ce point fait un tour sur lui-même en un jour et met une année à tourner autour du soleil ; ce n’est, pour le positiviste, qu’exprimer la même observation de deux façons différentes. Les observations sont la seule chose qui ait une existence effective et l’unique avantage, à l’actif de la théorie copernicienne, est qu’elle est plus simple à formuler et plus facile à généraliser. Les lois de l’astronomie ne