Page:Planck - Initiations à la physique, trad. du Plessis de Grenédan, 1941.djvu/109

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réduire, en fin de compte, à un complexe de perceptions tout ce qui se passe dans l’univers ; mais il existe encore une autre mesure, beaucoup plus importante pour certaines questions, indépendante de la manière d’être et d’agir de l’intellect qui mesure, et propre aux choses elles-mêmes. Cette mesure, à vrai dire ne nous a pas été immédiatement donnée ; mais nous cherchons à la découvrir et quand nous ne devrions jamais atteindre complètement le but idéal, nous nous en rapprochons du moins sans cesse par un travail ininterrompu. Chaque pas, sur ce chemin, trouve son salaire, comme l’histoire de chaque science nous l’apprend, dans mille succès divers. La science admet donc l’existence d’un monde extérieur subsistant en soi et, tout aussitôt, elle y rattache la question de la causalité, c’est-à-dire des lois qui régissent tout ce qui se passe dans l’univers, en tant que concept tout à fait indépendant de nos perceptions sensibles ; et elle se fait un devoir de rechercher si, et jusqu’à quel point, la loi de causalité est applicable dans la nature et dans le monde de l’esprit aux divers faits qui s’y produisent.

Nous le voyons, la science se trouve ici exactement au point que Kant a pris pour origine de sa théorie de la connaissance. Comme dans la philosophie kantienne, ainsi dans chaque science particulière, le concept de cause appartient aux catégories sans lesquelles la connaissance, en général, ne peut être acquise. Par contre, il existe une certaine différence, en ce sens que Kant ne pose pas seulement le concept de causalité, mais aussi, dans une certaine mesure, le contenu de la loi de causalité, comme immédiatement donné par l’intuition et, par suite, comme universellement valable. Cette démarche, les sciences particulières ne peuvent pas la faire avec lui. Bien plus, elles doivent se réserver d’examiner, dans chaque cas particulier, ce que signifie la loi de causalité et de remplir peu à peu d’un contenu fécond, grâce à la recherche inductive, la forme, vide en soi, du concept de cause.