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SALON DE 1833. 2-21 des vœux pour qu'il comprît l'intervalle immense qui sé- pare Sgrieci de Byron, Henri Herz de Hummel ; mais il s'est obstiné dans son indolence féconde, il a continué de croire que ses moindres coups de pinceau devaient être précieusement recueillis ; il s'est fié sans réserve aux adu- lations complaisantes de ses amis, et, sans perdre le charme incontestable de sa manière, il a produit des ouvrages que la critique doit réprouver. La poésie est absente, comme il a deux ans ; mais la couleur est fausse, pour vouloir être brillante ; la perspective est outrageusement violée ; les maisons chancellent, dansent et sont avinées ; les figu- res ne sont que des ébauches diaphanes et inintelligibles. C'est un grand malheur que je déplore ; voilà pourtant où mène la flatterie ! Je ne puis pas dire non plus que Decamps soit en pro- grès. Ses deux aquarelles sont inventées avec une grande richesse de physionomies individuelles ; mais il y manque une qualité de premier ordre, l'intérêt lumineux et pathé- tique : tous les tons sont de la même gamme, toutes les têtes ont la même importance. J'aime son Singe paysa- giste. Son Paysage turc me semble inférieur à une compo- sition du même genre, envoyée au Salon dernier, et qui représentait le derrière dune maison. Quant à sa Cara- vane, je pense qu'il est utile de la blâmer. La couleur en est séduisante et magique ; mais le ciel est maçonné : les chevaux, les chameaux et les hommes n'ont pas de forme appréciable ; il n'y a que les murs qui soient admirables de tout point. Assuré comme il l'est de l'attention et de la bienveillance publique, avec une palette comparable à celle de Rubens et de Rembrandt, il est fâcheux que Decamps néglige un élément de succès et de durée, la vérité des lignes et des contours; attendons-le au Salon prochain.