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TIRLIBERLY.

CONTE.

Lise couchée, au retour de l’église,
Disait à Jean : Mon Dieu, le bel outil ?
Quel est son nom ? — Tirliberly, dit-il.
« — Tirliberly, sera vraiment, — dit Lise,
« Dorénavant mon bijou favori. »
Tirliberly mit toute son entente
À bien ouvrer, tant qu’en peu dépéri.
Jean se souvint qu’il avait une tante,
Et s’embarqua pour le Pondichéry ;
Au bord de l’eau, grands adieux ! l’on s’embrasse
Propos de femme, et fadeurs de mari :
— Lise, au revoir ! Jean, mon ami, de grâce,
Laisse-le-moi !… — Quoi ? — Le Tirliberly.
L’homme eut beau dire, et beau rire et beau faire,
S’il ne le laisse, il ne partira point ;
Lise l’a dit… Donc pour la satisfaire,
Jean fouille et prend par-dessous son pourpoint,
N’importe quoi, tout ce qui vint à point,
Propre à donner le change à l’ingénue.
Quoi que ce fût : « Tiens, — dit-il, — le voilà ;
Cours après, cherche. — Et ce disant, il rue
Ce qu’il tenait, dans l’herbe haute et drue,
Puis, sur le-champ monte en mer et s’en va.

Or, n’ayez peur que simple ou trop honnête,
Lise, à tourner incessamment la tête
Vers le vaisseau, gagne un torticolis :
Ce n’est le point, où son esprit s’arrête ;