Des chemins couverts et mêlés ;
Dans tes plus sombres défilés
Je suis toujours sur ton passage.
Te souvient-il de ce moment
Où, ballotté par ton caprice,
Je soupirais si tendrement,
En accusant ton injustice !
J’appuyais ces soupirs trop vains,
Par un beau déluge de larmes.
Tes yeux alors semblaient sereins,
Tu jouissais de mes alarmes.
Eh bien ! ces pleurs, ils étaient feints ;
J’en suis désolé pour tes charmes !
Te souvient-il encor, d’un soir,
Où, sur un sofa renversée,
Et par cent zéphirs caressée,
Dans le plus magique boudoir,
Trois fois tu m’étais retracée
Par le jeu du triple miroir !
Tes frais vêtements laissaient voir
Une jambe au hasard jetée,
Attitude exprès méditée
Pour me rembarquer dans l’espoir !
La lumière demi-voilée
Colorait ton sein presque nu,
Allant, sans être contenu,
Comme une fleur sort effeuillée
Du calice qu’elle a rompu.
J’ordonnai : mes yeux s’allumèrent,
Doux avant-coureurs des plaisirs ;
Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/58
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.