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LE MAL D’AVENTURE.

CONTE.

Alison se mourait d’un mal
Au bout du doigt ; mal d’aventure.
— Va trouver le père Pascal, —
Lui dit sa sœur, — et plus n’endure ;
Ses remèdes sont excellents ;
Il te guérira, je t’assure :
Il en a pour les maux de dents,
Pour l’écorchure et pour l’enflure ;
Il fait l’onguent pour la brûlure.
Va donc, sans attendre plus tard,
Le mal s’accroît quand on recule ;
Et lui dis bonjour de ma part. —
Elle va, frappe à la cellule
Du révérend frère Frappart.
— Bonjour, mon frère, Dieu vous gard, —
Dit-elle, — ma sœur vous salue,
Et moi qui suis ici venue.
Lasse à la fin de trop souffrir ;
Mais ma sœur vient de me promettre
Que vous voudrez bien me guérir
Un doigt qui me fera mourir :
Non, je ne sais plus où le mettre.
— Mettez, — dit Pascal, — votre doigt,
Les matins, en certain endroit
Que vous savez. — Hélas ! que sais-je ?
Dites-le moi, frère Pascal,
Tôt, car mon doigt me fait grand mal.
— Ô l’innocente créature !