Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/125

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

AVEU D’AGNÈS

SUR SON PROCHAIN MARIAGE.

« Je ne suis ni froide ni dure,
« Et je sens (soit dit entre nous),
« Certains aiguillons de nature,
« Un peu plus haut que le genoux,
« Un peu plus bas que la ceinture,
« Qui me disent assez qu’il me faut un époux.
« Jadis en ce beau lieu vivait un pucelage
« Qui se laissa, comme un poisson,
« Prendre à l’appât de l’hameçon,
« Et mourut sans pouvoir se sauver à la nage ;
« Il faut, le maudit pucelage !
« Qu’il en passe bientôt le pas,
« Afin qu’il ne m’étouffe pas.
« Je le veux étouffer à l’avril de son âge.
« Croyez-moi, d’un mari l’on goûte les douceurs
« Qui chatouillent nos sens et qui charment nos cœurs ?
« Et dans ces passe temps, pour contenter sa flamme,
« Une fille n’a pas le plaisir d’une femme.
« Si quelque jeune laboureur
« Débauche une fille et l’affronte,
« La fille en a toute la honte.
« Le galant en a tout l’honneur.
« Mais des que dans le mariage
« La femme souffle un favori,
« La honte en est toute au mari.
« La femme en a tout l’avantage…… »