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Volupté que je goûte au sein de ma famille.
Je lui survis : je sais qu’il en reste une fille,
Digne des sentiments que j’eus toujours pour lui ;
Charmante, vertueuse, & pourtant sans appui.
Dans mon cœur attendri, son père vit encore.
Pour elle, par ma voix, cet ami vous implore :
Je lui devois mes biens, & vous me les devez ;
Vous lui devez le père enfin que vous avez.
Que l’un de vous m’acquitte, en s’acquittant lui-même ;
Rendons sa fille heureuse ; elle est digne qu’on l’aime ;
Je vous l’offre : voilà de quoi vous signaler ;
Et c’est-là le présent dont je voulois parler.

ÉRASTE, saluant ses frères

Honneur à mes aînés. Répondez.

DAMIS

Mon silence
Témoigne que j’approuve ; & non que je balance.
Oui, la fille d’Argante a droit sur l’un de nous ;
Et, pour une inconnue opposer des dégoûts,
Ce seroit s’excuser sur un frivole obstacle ;

À ses frères.

Il la faut épouser.

VALÈRE

C’est parler à miracle ;
Si l’auditeur dit non, l’auditeur est un sot.
Cadet, crois-moi, prends-la ; c’est-là ton vrai ballot.
Un garçon comme toi ne sent rien, n’a point d’âme ;
Et ne sait seulement ce que c’est qu’une femme.