Page:Piron - Œuvres complettes, 1776, tome 1.djvu/206

Cette page n’a pas encore été corrigée
CHRISALDE

Sa chute, je l’avoue…

GERONTE

De la fortune ainsi tourne, ici bas, la roue.
Depuis un an entier, la perte d’un vaisseau
A causé sa ruine, & l’a mis au tombeau.
Voilà, de ses malheurs, la première nouvelle.
Il auroit dû compter sur un ami fidèle ;
Et sans s’abandonner à son mortel ennui,
M’écrire, & s’assurer que j’étois tout à lui.
Sa disgrâce, après tout, n’étoit pas sans remède.
Ce que j’ai lui restoit. Sa fille lui succède ;
Sa fille héritera de ce que je lui dois ;
Et vous n’ignorez pas ce qu’il a fait pour moi.

CHRISALDE

Vous m’avez dit cent fois qu’Argante, en Italie,
Au péril de ses jours, défendit votre vie ;
Puis, vous associant à sa prospérité,
Vous mit dans l’opulence où vous avez été.
Angélique est au point où vous trouva son père.
Mais pour elle, entre nous, que voulez-vous qu’opère
Ce tendre empressement que vous lui faites voir ?

GERONTE

Je songe à son bonheur ; & je la veux pourvoir.

CHRISALDE

De semblables projets ne sont pas des vétilles.
La pourvoir ! & comment ?