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De l’époque romaine au xie siècle, il ne semble pas que la superficie du sol cultivé ait sensiblement augmenté. Les monastères n’ont guère changé à cet égard, sauf dans les pays germaniques, la situation existante. Ils s’établirent presque toujours sur d’anciennes terres et ne firent rien pour diminuer l’étendue des bois, des bruyères et des marécages compris dans leurs domaines. Mais il en fut tout autrement du jour où l’augmentation de la population permit de mettre en valeur ces terrains improductifs. À partir des environs de l’an mil, commence une période de défrichement qui continuera en s’amplifiant toujours jusque vers la fin du xiie siècle. L’Europe se colonisa elle-même grâce à l’accroissement de ses habitants. Les princes et les grands propriétaires se mirent à fonder des villes neuves où affluèrent les cadets en quête de terres à cultiver[1]. Les grands bois commencèrent à s’éclaircir. En Flandre apparaissent vers 1150 les premiers polders[2]. L’ordre de Cîteaux, fondé en 1098, s’adonne aussitôt au défrichement et au déboisement.

Comme on le voit, l’augmentation de la population et le renouveau d’activité dont elle est à la fois la cause et l’effet, a tourné au profit de l’économie agricole. Mais elle devait exercer aussi sa répercussion sur le commerce. Il entre dès avant le xie siècle dans une période de renaissance. Cette renaissance a débuté sous l’action de deux

  1. Sur l’augmentation de la population au xie siècle voy. Lambert de Hersfeld, Annales, p. 121, éd. O. Holder-Egger (Hanovre, 1894) ; Suger, Recueil des Historiens de France, t. XII, p. 54 ; Herman de Tournai, Mon. Germ. Hist. Script., t. XIV, p. 344.
  2. H. Pirenne, Histoire de Belgique, t. I, 4e éd., p. 148, 300.