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gies qu’il y imprime. Rappelons que les ateliers monétaires ont longtemps conservé, sous les rois mérovingiens, la coutume de faire figurer le buste de l’empereur sur les monnaies, de représenter au revers des pièces la Victoria Augusti et que, poussant l’imitation à l’extrême, ils n’ont pas manqué, lorsque les Byzantins ont substitué la croix à l’image de cette Victoire, de suivre aussitôt leur exemple. Une servilité si complète s’explique nécessairement par des motifs impérieux. Elle a évidemment pour cause la nécessité de conserver entre la monnaie nationale et la monnaie impériale une conformité qui serait sans raison si les rapports les plus intimes n’avaient subsisté entre le commerce mérovingien et le commerce général de la Méditerranée, c’est à dire si ce commerce n’avait continué de se rattacher par les liens les plus étroits au commerce de l’Empire byzantin[1]. De ces liens, au surplus, les preuves abondent et il suffira d’en rappeler ici quelques-unes des plus significatives.

Remarquons tout d’abord que Marseille n’a pas cessé d’être jusqu’au commencement du viiie siècle, le grand port de la Gaule. Les termes employés par Grégoire de Tours dans les nombreuses anecdotes où il lui arrive de parler de cette ville, nous obligent à la considérer comme un centre économique singulièrement animé[2]. Une navigation

  1. M. Prou, Catalogue des monnaies mérovingiennes de la Bibliothèque Nationale de Paris. Introduction ; H. Pirenne, Un contraste économique. Mérovingiens et Carolingiens (Revue belge de philologie et d’histoire, t. II [1923], p. 225).
  2. Historia Francorum, édit. Krusch, l. IV, § 43, l. V, § 5, l. VI, § 17, 24, l. IX, § 22. Cf. Grégoire le Grand, Epistolae, I, 45. Il y avait à Marseille un entrepôt (cellarium fisci, catabolus) pourvu d’une caisse alimentée incontestablement par les droits d’entrée et qui était encore assez riche à la fin du viie siècle,