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de s’occuper des affaires de la bourgeoisie. Ainsi, sans posséder pour cela aucun titre légal, l’association marchande se consacre de sa propre initiative à l’installation et à l’aménagement de la ville naissante. Son initiative supplée à l’inertie des pouvoirs publics. On la voit consacrer une partie de ses revenus à la construction d’ouvrages de défense et à l’entretien des rues. Et l’on ne peut douter que ses voisines des autres villes flamandes n’aient agi comme elle. Le nom de « comtes de la Hanse » que les trésoriers de la ville de Lille conservèrent pendant tout le Moyen Âge prouve suffisamment, en l’absence de sources anciennes, que là aussi, les chefs de la corporation marchande disposèrent de la caisse de la gilde au profit de leurs concitoyens. À Audenarde, le nom de hansgraaf est porté jusqu’au xive siècle par un magistrat de la commune. À Tournai, encore au xiiie siècle, les finances urbaines sont placées sous le contrôle de la charité Saint-Christophe, c’est à dire de la gilde marchande. À Bruges, les cotisations des frères de la hanse alimentèrent jusqu’à la disparition de celle-ci lors de la révolution démocratique du xive siècle, la caisse municipale. Il résulte de tout cela jusqu’à l’évidence que les gildes furent dans la région flamande, les initiatrices de l’autonomie urbaine. D’elles-mêmes, elles se chargèrent d’une tâche dont personne d’autre n’eût pu s’acquitter. Officiellement elles n’avaient aucun droit à agir comme elles le firent. Leur intervention s’explique uniquement par la cohésion qui existait entre leurs membres, par l’influence dont jouissait leur groupe, par les ressources dont il disposait, par l’intelligence enfin qu’il possédait des nécessités collectives de la