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Dans la période agricole et domaniale du Moyen Âge, tous ces endroits s’étaient distingués par leur richesse et leur influence. Mais trop éloignés des grandes voies de communication, ils ne furent pas atteints par la renaissance économique, ni si l’on peut ainsi dire, fécondés par elle. Au milieu de l’efflorescence qu’elle a provoquée, ils sont restés stériles, comme des semences jetées sur la pierre. Aucun d’eux ne s’est élevé, avant les temps modernes, au-dessus du rang d’une simple bourgade à demi-rurale[1]. Et il n’en faut point davantage pour préciser le rôle joué dans l’évolution urbaine, par les cités et les bourgs. Adaptés à un ordre social très différent de celui qui a vu naître les villes, ils n’ont point donné naissance à celles-ci. Ils n’ont été, pour ainsi parler, que les points de cristallisation de l’activité commerciale. Elle ne sort point d’eux, elle y arrive du dehors quand les circonstances favorables du site l’y font confluer. Leur rôle a été essentiellement un rôle passif. Dans l’histoire de la formation des villes, le faubourg commercial dépasse de beaucoup l’importance du bourg féodal. C’est lui qui est l’élément agissant et c’est par lui, comme on le verra, que s’explique le renouveau de la vie municipale qui n’est que la conséquence du renouveau économique[2].

  1. On peut faire la même observation pour les cités de Bavai et de Tongres qui avaient été à l’époque romaine des centres administratifs importants dans le Nord de la Gaule. N’étant situées sur aucun cours d’eau, elles ne profitèrent pas de la renaissance commerciale. Bavai a disparu au ixe siècle ; Tongres est resté jusqu’à nos jours sans aucune importance.
  2. Je ne prétends pas naturellement que l’évolution se soit passée exactement dans toutes les villes de la même manière. Le faubourg marchand ne se distingue pas partout aussi nettement du bourg primitif que, par exemple, dans les villes fla-