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LIVRE IV


LA GUERRE DES INVESTITURES
ET LA CROISADE




CHAPITRE PREMIER

L’ÉGLISE

I. – La papauté

L’Empire déclinant, la papauté, on l’a vu plus haut, avait profité de ce qu’il avait perdu de vigueur et d’éclat. Mais elle ne pouvait se maintenir par ses propres forces à la hauteur à laquelle elle était montée. Elle reposait sur l’Empire, elle s’était, si l’on peut ainsi dire, hissée sur lui. Quand il s’effondra, elle fut précipitée à sa suite. Tout d’abord, violentée par les rois de fortune qui se disputent l’Italie et la couronne impériale, elle devient la proie, au commencement du xe siècle, de la féodalité romaine. Les seigneurs de la campagne de Rome luttent entre eux à qui la fera entrer dans leur famille. Sans doute, le pape continue à être nommé par le clergé et le peuple de la ville, mais il est trop facile d’en imposer par la force aux électeurs, ou de renverser l’élu qui n’agrée pas au parti le plus puissant. L’élection du pape par la communauté du clergé et des fidèles s’était faite régulièrement aussi longtemps qu’il y avait eu à côté de la papauté un pouvoir fort. Elle avait d’abord été contrôlée par l’exarque, puis par les missi. Mais depuis la décadence de l’Empire, la désignation du pape se fait sous la pression des féodaux. Les papes de ce temps paraissent et disparaissent au gré des factions féodales ; il en est qui meurent assassinés, d’autres finissent leur vie en prison. Dans ce milieu romain où la démoralisation des mœurs semble aller de pair avec leur brutalité, des intrigues de femmes ont disposé plus d’une fois