populaires étaient semées parmi le peuple, où la crise industrielle servait de prétexte pour discréditer le gouvernement[1]. Une presse furibonde se dépensait en injures et en calomnies contre le régime. Elle taxait les Chambres « d’assemblée d’idiots nommés par des idiots » ; elle ne voyait dans le roi qu’un « vampire couronné, un usurpateur fainéant, un commis-voyageur électoral »[2]. Une brochure publiée en 1835 par un pamphlétaire français aux gages du parti dépeignait les journées de septembre « après l’éloignement généreux du prince Frédéric », comme un mouvement dirigé par « des galériens venus de France », le Congrès, comme une « majorité de lâches », le roi, comme un aventurier « ramassé » par des intrigants, la Belgique, comme un « repaire », une « colonie banale de tous les royaumes » condamnée à se dissoudre bientôt au milieu de la haine réciproque des Wallons et des Flamands sous l’exploitation de la France et de l’Angleterre[3]. L’Église n’était pas mieux traitée. À Gand, le journaliste Lebrocquy appelait la population aux armes contre « les prêtres hypocrites et vindicatifs » qui la dominaient : « il ne s’agit pas d’une lutte de parti à parti ; vous avez à défendre la civilisation contre la barbarie »[4].
Il faut sans doute expliquer ces outrances par l’exaspération de folliculaires enragés de leur fiasco. Comme l’argent qui les payait, tous leurs efforts se dépensaient en pure perte. À la distance où l’on est aujourd’hui de ces fureurs, on se rend clairement compte de leur échec. En attaquant à la fois les catholiques et les libéraux, les Orangistes se condamnaient à ne parler que pour eux-mêmes. Au Parlement, ils renforçaient contre eux l’union des partis qu’ils injuriaient l’un et l’autre.
- ↑ Gedenkstukken, loc cit., t. V, p. 5. Des agents orangistes chantaient en public des chansons patriotiques, mais ils en vendaient d’autres à leurs auditeurs, où l’on faisait ressortir la misère du pays. Voy. des spécimens de ces chansons dans Avanti, Een terugblik, p. 72 et suiv. (Gand, 1908).
- ↑ E. Discailles, Charles Rogier, t. II, p. 266 (Bruxelles, 1892).
- ↑ Charles Froment, Études sur la révolution belge (Gand, 1835).
- ↑ P. Lebrocquy, Souvenirs d’un ex-Journaliste, p. 35 (Bruxelles, 1842).