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amener Guillaume à se désister du Limbourg et du Luxembourg. La défiance qu’il avait réveillée chez Palmerston l’avait tout de suite amené à récipiscence. On ne pouvait donc compter sur le roi des Français, et de la France elle-même, où leur impuissance contraignait maintenant les républicains au silence, pas un appui à attendre. Inutilement Léopold suppliait sa nièce, la reine Victoria, d’intervenir. Il n’en recevait que des conseils de soumission et dans son dépit il parlait d’abdiquer. L’unique concession de la Conférence, celle de réduire à cinq millions de florins le montant de la rente prévue par le traité des XXIV articles, faisait mieux ressortir sa résolution de ne pas céder sur tout le reste et apparaissait à bien des gens comme un outrage. L’outrance des discours prononcés aux Chambres irritait les Puissances. Le roi de Prusse et l’empereur d’Autriche rappelaient leurs ministres de Bruxelles. Palmerston lui-même perdait patience et menaçait de laisser occuper le Limbourg et le Luxembourg par les troupes de la Confédération germanique.

Le discours du trône en affirmant, le 13 novembre 1838, que les droits du pays seraient défendus « avec persévérance et courage », fit croire ou laissa affecter de croire que le roi irait jusqu’à tirer l’épée. Quelques jours plus tard, la Conférence lui répondait par son protocole du 6 décembre, déclarant pour la dernière fois que ses décisions étaient irrévocables. Le 1er février 1839, Guillaume y donnait son adhésion, passant ainsi du côté des Puissances dont il avait si longtemps repoussé les avances.

Dès lors, la situation de la Belgique devenait bien plus mauvaise qu’elle ne l’avait été sept ans auparavant lorsqu’elle avait rejeté les bases de séparation admises par Guillaume. Aujourd’hui, en effet, c’était un traité accepté par elle qu’elle refusait d’accomplir parce que, contre son attente, la partie adverse s’y ralliait. L’acquiescement de Guillaume la plaçait en face de cette alternative : ou céder, ou se préparer à tenir seule tête à toute l’Europe. Le 19 février, le comte de Theux déposait sur le bureau de la Chambre un projet de loi ratifiant l’odieux traité. Durant quinze séances, un débat furieux mit