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L’inauguration du roi eut lieu le 21 juillet, sur cette même Place Royale qui avait vu se dérouler quinze ans auparavant, au milieu d’une pompe officielle et glacée, celle de Guillaume Ier.

La cérémonie toute populaire et démocratique répondit bien au caractère de la « monarchie républicaine » qui y débutait. Au centre de la place se dressait le jeune arbre de la liberté. En face, sur les degrés de l’église Saint-Jacques, on avait élevé un dais au front duquel se détachaient les noms des combats victorieux de la révolution. La blouse bleue des volontaires remplaçait au-dessus du trône les armoiries héraldiques. Reçu par les membres du Congrès, Léopold, revêtu du costume de lieutenant-général de l’armée belge, fut conduit tout d’abord à un fauteuil d’où il assista à la déposition des pouvoirs du Régent. On lui lut ensuite la constitution. Il y prêta serment : une salve de cent-un coups de canon annonça au peuple qu’il avait un roi. Il monta ensuite au trône avec une distinction de manières et un calme qui soulignaient la souveraineté que la nation venait de lui confier. « Belge par votre adoption, dit-il, de sa voix lente et grave, je me ferai aussi une loi de l’être toujours par ma politique ». Il venait de prononcer les paroles auxquelles son long règne devait être fidèle jusqu’au bout.

Pendant qu’il se rendait à pied à travers les flots des gardes civiques et du peuple au Palais royal, les membres du Congrès gagnaient le Palais de la nation pour y déposer leur souveraineté avec la même simplicité qu’ils l’avaient prise[1]. Leur tâche était accomplie. La constitution élaborée par eux entrait en vigueur. Trois jours après, le roi constituait son premier ministère et convoquait le corps électoral pour la nomination du Sénat et de la Chambre des Représentants.


II


Le 22 juin, Guillaume Ier avait solennellement déclaré « qu’il considérerait comme son ennemi le personnage qui accepterait la Belgique sans avoir souscrit les bases de séparation ». La

  1. Le Congrès ne fut d’ailleurs dissous, comme assemblée législative, que le jour de la réunion des Chambres.