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poussée à bout, rappelait de Bruxelles Belliard et Ponsonby. Nulle illusion à se faire sur un nouveau désaccord de la France et de l’Angleterre. Palmerston et Casimir Périer marchaient la main dans la main.

Néanmoins, les diplomates avaient peur de ces Belges qui n’avaient peur de rien. Ne parlaient-ils pas de recevoir à coups de fusil les troupes de la Confédération germanique si elles entraient dans le Luxembourg ? Et s’ils tiraient, ne provoqueraient-ils pas aussitôt une révolution à Paris et cette guerre générale que l’on avait déjà tant fait pour éviter. On avait beau les considérer comme le scandale de l’Europe, railler l’ignorance et l’incapacité des délégués qu’ils venaient d’envoyer pour la seconde fois à Londres, force était bien de leur faire l’honneur de parlementer avec eux. Palmerston avait éclaté de rire tout d’abord en entendant leurs propositions. Leur ténacité n’en laissa pas moins de triompher. Sur un point d’ailleurs ils entendaient raison. Ces démocrates consentaient à renoncer à la Flandre Zélandaise qu’en contradiction avec leurs principes ils avaient revendiquée par raison d’État. Ils ne se montraient inébranlables que dans leur résolution de ne pas abandonner les Limbourgeois et les Luxembourgeois qui s’étaient soulevés avec eux. Ils se résignèrent pourtant à admettre le 26 juin, après des discussions infinies, l’accommodement qui fut mis en forme dans le projet de traité dit des XVIII articles. Ils stipulaient qu’une négociation spéciale entre la Belgique, la Hollande et la Confédération germanique réglerait la question du Luxembourg. Pour le Limbourg, il serait fait un arrangement convenable, grâce à l’échange des enclaves que les Provinces-Unies et les Pays-Bas autrichiens possédaient à la fin du xviiie siècle sur leurs territoires respectifs[1]. Quant à la liquidation des dettes de l’ancien royaume, chacune des parties

  1. Les bases de séparation assignant à la Hollande son statut national de 1790 n’avaient pu lui attribuer ces enclaves qu’elle ne possédait pas alors. Elle ne les obtint que par un traité avec la France, le 5 janvier 1800. C’est J.-B. Nothomb, qui s’avisa de cette particularité qui avait évidemment échappé à l’attention de la Conférence. En interprétant le texte des bases dans sa lettre sinon dans son esprit, il fournissait l’échappatoire que tout le monde désirait.