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querelle s’engage avec une âpreté croissante. Prudemment, on l’a vu, le gouvernement s’abstient d’enfiévrer les Chambres en la portant devant elles. Mais il n’est pas possible de différer plus longtemps le combat. Il éclate dès 1840 et il n’est plus d’élection où il ne mette aux prises les partis. Le clergé s’y lance avec fougue, représentant du haut de la chaire les libéraux comme instigués par les loges, qu’une lettre pastorale des évêques a solennellement condamnées en 1837. Les libéraux répondent à ces attaques en déchaînant contre les « sacristies » leurs journaux, beaucoup plus nombreux et plus actifs que ceux de leurs adversaires. La Revue Nationale fondée, date caractéristique, en 1839, par Paul Devaux, pourfend l’unionisme, comme une politique désormais sans objet et sans dignité, ne profitant qu’aux seuls catholiques, et que le moment est venu de remplacer par une « politique d’avenir ».

L’anticléricalisme que les Orangistes avaient discrédité en le professant cesse d’être suspect depuis que, vers 1842, désespérant d’une restauration, ils viennent s’affilier au parti libéral et lui apportent l’appui de leurs loges et de leur presse. De Paris, il se répand en même temps comme l’avait fait jadis la propagande républicaine. Les livres d’Eugène Sue provoquent une « levée de boucliers contre les Jésuites ». Le Juif errant est publié en feuilleton par les journaux de gauche et, en 1845, une médaille d’or est offerte à son auteur en signe d’admiration et de reconnaissance. En 1841, le projet d’accorder la personnification civile à l’Université de Louvain provoque des bagarres si graves que par prudence les évêques écrivent à la Chambre des représentants qu’ils y renoncent. La même année se fonde la société L’Alliance, constituée en vue de réunir en une action commune toutes les forces anticléricales.

Bien entendu, au calme des assemblées électorales commence à se substituer une agitation et des pratiques jusqu’alors inconnues : transport gratuit des électeurs jusqu’au lieu du

    ont à peine les premières notions des connaissances dont ils se font les professeurs ». On n’exige d’eux aucune preuve de capacité ; toute inspection fait défaut. Le gouvernement se borne à accorder çà et là sans méthode quelques subsides.