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LA RÉUNION

principauté de Liège, la petite principauté abbatiale de Stavelot-Malmédy étant attribuée tout entière à celui de l’Ourthe ; le duché de Luxembourg avec des lambeaux du territoire liégeois forma celui des Forêts, chef-lieu Luxembourg ; celui de Sambre-et-Meuse, chef-lieu Namur, fut un composé de régions appartenant jadis au comté de Namur, à la principauté de Liège, au duché de Brabant et au duché de Luxembourg. Lorsque, le 26 octobre 1795, le duché de Bouillon, enlevé par Louis XIV à l’évêque de Liège au profit de la maison de La Tour d’Auvergne, fut à son tour réuni à la France, son territoire vint accroître ceux des départements des Forêts, de Sambre-et-Meuse et des Ardennes[1].

Il est intéressant de constater que la division départementale modifia somme toute moins complètement la physionomie de la Belgique qu’elle n’avait modifié celle de la France. Les commissaires du Comité de Salut Public furent bien obligés de placer les centres de la nouvelle organisation dans les villes qui, depuis des siècles, étaient les foyers principaux de l’activité sociale et économique. Les nécessités de la vie l’emportèrent sur les combinaisons de la politique. Le caractère essentiellement urbain du pays le sauva d’une perturbation totale. Dépouiller ses grandes villes de leur importance traditionnelle, c’eût été rendre impossible le fonctionnement de l’administration qu’on lui imposait. Il fallut les adopter comme chef-lieux des départements, si bien que l’édifice républicain construit sur les ruines de l’Ancien Régime, reposa sur les mêmes colonnes qui avaient soutenu ce dernier et par cela même fut obligé dans une large mesure d’en conserver les dispositions principales.

Cela explique sans doute la facilité avec laquelle les habitants s’accoutumèrent à leur nouvelle demeure. Elle était en réalité bien plus commode que l’ancienne. De bonne heure ils apprécièrent la simplicité et la régularité de son plan. Sans violenter leurs habitudes, elle leur apportait l’inappréciable

  1. Voy. la carte des départements dressée et commentée par M. F. Ganshof dans l’Atlas de géographie historique de la Belgique publié par L. van der Essen (Bruxelles, 1919).