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L’INSTALLATION DU RÉGIME

Rien n’est plus caractéristique des tendances de Guillaume à cet égard que la promulgation, le 27 septembre 1815, moins d’une semaine après son inauguration à Bruxelles, d’un arrêté décidant l’érection en Belgique d’une ou de plusieurs universités. Un comité formé de savants et de professeurs belges fut chargé d’étudier la question. Le rapport très intéressant qu’il soumit au roi (18 février 1816) se caractérise par un alliage singulier de propositions inspirées les unes par la tradition nationale, les autres, par le progrès des idées modernes. Il conclut en faveur d’une seule université qui aurait repris la place de celle de Louvain abolie en 1797, et dont tous les professeurs seraient catholiques. L’enseignement de la théologie ne relevant que des évêques, serait abandonné par les universités aux séminaires. En revanche, et en ceci le comité apparaît singulièrement novateur, une faculté des sciences politiques serait instituée[1].

Ces suggestions furent repoussées par le gouvernement. Il ne pouvait, sans violer la Loi fondamentale, réserver aux seuls catholiques les chaires universitaires. D’autre part, par besoin d’uniformité, il décida que de même qu’il y avait trois universités dans le Nord, à Leyde, à Utrecht et à Groningue, il y en aurait trois dans le Sud qui furent placées à Gand, à Louvain et à Liège. La seule concession faite aux Belges fut de remettre à plus tard la création de facultés de théologie. On ne constitua pour le moment que celles de philosophie et lettres, de droit, des sciences et de médecine, s’en tenant exclusivement à l’organisation et aux programmes hollandais. Comme les universités hollandaises aussi, les universités belges furent dans toute la force du terme des universités d’État. L’État seul, après avoir pris l’avis du Collège des curateurs, nommait les professeurs, et seul aussi il subvenait aux traitements et aux dépenses provoquées par l’outillage scientifique. L’érection et l’entretien des bâtiments universitaires incombait toutefois aux communes. Peut-être eût-il été préférable de ne créer, suivant la proposition du comité, qu’une seule université.

  1. Gedenkstukken 1815-1825, t. III, p. 195.